Camille Langdon ♫ I like myself like this.

Que dire sur ton histoire qui ne soit pas cliché ? T'es née à Londres, en pleine fin d'après-midi. Dernière enfant d'une famille déjà bien remplie. Six au total, trois tornades te servant de frères et toi, seule petite fille au milieu d'un torrent de voitures, de bagarres et d'autres folies masculines. Maman est au Paradis, enfin une petite fille, une petite Princesse, Papa lui se demande à quoi ça va bien pouvoir ressembler, toi seule petite demoiselle au milieu des sagouins te servant d'aînés. Bizarrement tes frères ne prennent pas mal cette intrusion dans leur univers. Au mieux, ils auront quelqu'un en plus avec qui jouer au Jedi, au pire, ils auront une victime de l'autorité toute puissante des frères.

Chance ou pas, t'es pas mieux que les trois autres. Si aux premiers abords tu as tout d'une délicate demoiselle, tes camarades d'écoles comprennent bien vite que tu ne vaux pas mieux que tes grands-frères adorés, au grand damne de Maman qui aurait préféré un caractère plus doux. Treize ans d'écart avec le premier né, Nathanaël, ce qui ne t'empêche pas de suivre sa trace à la manière d'un bébé canard à la recherche de sa mère. L'école, c'est pas vraiment ta tasse de thé, tu bouges tout le temps, n'aime pas rester en place et tu refuses toute forme d'autorité. Alors Maman et Papa trouvent des techniques, ils tentent de faire faire du sport en dehors de l'école pour tenter de te canaliser. Judo, Karaté, Football, tout y passe. Tu rejoins même le club de boxe d'un de tes frères.

Habituée au chahut constant, tu sais te faire plus douce pourtant. Que ce soit avec tes parents où avec tes frères. Tu te fais confidente du dernier des frères, celui avec lequel tu partages tout. Une seconde moitié à ton âme. Au lycée, tu te trouves un groupe d'amis avec lequel tu traînes presque tout les jours. Vous vous canalisez tous et une espèce de fonctionnement à la manière d'un engrenage bien huilé trouve son chemin. Tout fonctionne entre vous sans même que vous n'ayez à faire grand chose. Avec le lycée arrive les premières soirées, les premières rencontres, puis les premières conneries. L'alcool, ça a été le premier. Une gorgée t'avais dis. De une, t'es passée à deux, puis trois, puis quatre, puis trop. Et à la fin de la soirée ? T'es entrain de danser sur la table basse d'un mec de ta classe, torchée comme on en fait plus. Bien entendu, ce sont tes frères qui l'apprennent avant les parents, et autant dire qu'ils trouvent une solution pour que personne n'en parle au lycée. Ca a des avantages les grands-frères, en plus d'être des fournisseurs de pulls bien trop grand quand t'as besoin. Et chauffeur privé.

Vous êtes une famille unie. C'est quelque chose que l'on peut voir dès le premier coup d'oeil. Pas d'engueulade, pas de haine, pas de jalousie latente entre les enfants. Vous avez tout de la parfaite famille anglaise comme on en fait plus. Et c'est quasiment le cas. Enfin, tant que personne ne sait que Papa aime aller voir ailleurs et que Maman trouve son bonheur ailleurs que dans les bras de son propre mari. Le divorce tombe tout seul, avec violence en prime de tout ça. Maman refuse qu'il parte de la maison. Tes deux aînés eux sont partis depuis longtemps, il ne reste que l'avant-dernier né et toi à la maison. Vous êtes deux au milieu du chaos, des aveux d'infidélités qui durent depuis des années, des hurlements. Le lycée est terminé pour vous deux, vous qui n'avez que deux ans d'écart. Le reste n'est pas vraiment à expliquer, Maman se barre, Papa se trouve quelqu'un d'autre et vous déménagez aux Etats-Unis. Toi, t'es pas encore majeur, alors t'as pas trop le choix, tu dois suivre le mouvement. Tes frères, tu sais plus, peut-être que certains ont suivis, d'autres non.

Sautons les années, clairement tu n'as rien fait d'intéressant jusqu'à tes vingt-cinq ans environs ? Ouais, un truc comme ça. Jusque là t'as eu des boulots, des études d'Art, des boulots alimentaires, quelques relations qui n'ont jamais su tenir. Puis à vingt-cinq ans t'as cette chance. New-York. Bien loin de là où Papa vous a installé, loin de tout, un départ à neuf. Nathanaël te passe un coup de fil, une opportunité de bosser dans la photographie, pas loin de lui dans cette ville dont tu ne connais rien. Bien sûr, tu ne réfléchis pas, t'accepte.

Sept longues années plus tard, tu passes la porte de l'appartement, un grand sourire aux lèvres, ton sac de travail est déposé au sol alors que tu viens enrouler tes bras autour de ton frère, ce dernier posé sur le tabouret de la cuisine. Sept ans de colocation fonctionnelle avec le premier né. Il partage sa journée, toi la tienne, tout deux autour d'un café et cet équilibre là, celui que tu as su te trouver avec lui, avec ton boulot actuel, avec tes relations comme elles sont, te va plus que bien.