trigger warnings : Intimidation, mort,
Il n’y a pas grand chose qui sorte de l’ordinaire lorsqu’on parle de ce qu’a été la vie d’Ethan Fitzpatrick jusqu’à aujourd’hui. Ce n’est pas un héros, sa famille ne vient pas d’une quelconque monarchie et il n’a pas connu de grands désarrois qui ont changé le cours de son existence. Il a eu une enfance tout à fait normale, dans le comté d’Essex. Presque banal, même. Fils unique d’un couple qui s’aimait assez pour s’endurer sans chercher à divorcer, il a fait ses premiers pas en Angleterre sans se douter qu’avant ses dix ans, les siens choisiraient de s’expatrier en Amérique afin d'accroître leur fortune. Il faut dire qu’à cette époque, le marché immobilier était beaucoup plus vaste à New York que dans l’Essex, tout comme les opportunités de développement commercial. Quitter sa terre natale fut une aventure qu’Ethan affronta avec un grand sourire aux lèvres, heureux de découvrir un tout nouveau monde.
Sauf que son sourire s’effaça assez rapidement. Son accent anglais que beaucoup de vieilles femmes qualifiait de charmant était moqué par ses nouveaux camarades d’école et il n’était pas rare qu’il se fasse pourchasser afin qu’il apprenne “qu’être différent, ce n’est pas bien”. Pourtant, le harcèlement et l’intimidation qu’il subissait quotidiennement n’effaça pas son optimisme à toute épreuve. Déterminé à faire sa place parmi eux, il commença à s’impliquer dans plusieurs sports différents tout comme dans la vie sociale de l’école. Lentement, on commença à l’apprécier pour qui il était véritablement et non pas pour quelque chose d’aussi superficiel que son accent. C'est d'ailleurs lors de l'une de ses nombreuses activités extra-scolaire qu'il découvrit sa passion pour la photographie. Jamais il n'avait pensé pouvoir aimer un objet autant que son appareil photo. Ses parents ne voyaient pas d'un bon œil ce passe-temps qu'ils décrivaient comme oisif auquel il consacrait tout son temps libre, mais comme il était un excellent étudiant, ils toléraient cette passion.
Intelligent et sociable, sa scolarité fut récompensée par d’excellents résultats, mais également par les rêves et les espoirs carriéristes de ses parents qui l’imaginaient médecin ou avocat célèbre. Alors qu'ils l'imaginaient aller dans les plus grandes universités, Ethan, lui, avait une âme beaucoup plus bohème et des rêves moins arrogamment grandiose. Ce fut là le tout premier désaccord qui souleva la famille Fitzpatrick. Pour la toute première fois de son existence, Ethan refusa de leur obéir et de renoncer à son rêve de gagner sa vie par la photographie. Il utilisa donc l’argent qu’il accumulait depuis des années en faisant plusieurs petits boulots pour louer un petit local et démarrer sa propre agence de photographie. Il en profita également pour quitter la maison familiale qui était devenue invivable tant la tension qui y régnait était à couper au couteau. Du luxe de Manhattan, il passa à la désolation du Bronx. Il aurait pu se recroqueviller sur lui-même, s'apitoyer sur ce changement drastique de rythme de vie, mais non. Ethan est un éternel optimiste. Il décida de vivre cette nouvelle aventure comme une possibilité de faire de nouvelles découvertes et s'investit à fond dans son agence.
Le succès de son agence fut d'abord modeste, mais connu un bon étonnant après quelques contrats lucratifs. Les photos d'Ethan étaient maintenant dans plusieurs magasines populaires et on l'interpellait de plus en plus pour des campagnes commerciales. Bien sûr, ce n'était pas le genre de photo qui changerait la face du monde, mais elles payaient bien. Le jeune Fitzpatrick songeait à enfin déménager sa boutique et son appartement dans un quartier plus sécuritaire et moins misérable que le Bronx lorsque ses parents connurent une fin tragique, dans un accident de voiture. Cette nouvelle vint bouleverser le jeune homme à un point tel qu'il en devint aphone pendant presque trente jour. Ils ne s'étaient jamais réconciliés et il était incapable de se pardonner cette distance entre eux. Ethan fut incapable de reprendre une photo suite à cet accident, la culpabilité lui étant si vive qu'il en avait perdu le droit d'exercer cette passion qu'il aimait plus que tout.
Grâce à l'héritage de ses parents et aux profits qu'ils avaient fait avec ses récentes campagnes publicitaires, il devint le propriétaire d'un luxurieux loft dans Manhattan et déménagea son agence dans le même quartier. Comme il était dans l'incapacité psychologique de retoucher un appareil photo, il entreprit de dénicher quelques jeunes talents qui bosseraient pour lui, sous sa supervision. En tant que directeur de l'agence, on ne s'attendait pas de lui qu'il photographie, mais qu'il dirige.
Aujourd'hui, les affaires vont bien, son nom est bien établis dans le monde artistique et commercial. Si on le lui demande, il répondra qu'il est heureux... mais l'est-il vraiment?
L'avenir nous le dira.